Colloque : Colonisation et guerre d’Algérie : oppositions intellectuelles (21-22/01)

Bibliotheques Paris

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La Bibliothèque nationale de France et l’Institut du monde arabe (IMA) s’associent pour organiser le colloque « Colonisation et guerre d’Algérie : oppositions intellectuelles ». Celui-ci répond à l’une des recommandations du rapport remis en janvier 2021 au président de la République par Benjamin Stora, historien spécialiste du Maghreb, sur les enjeux mémoriels de la guerre d’Algérie et le travail de vérité et de réconciliation nécessaire entre la France et l’Algérie. La première journée se déroule le 21 janvier à l’IMA, la seconde le 22 janvier à la BnF. 

En ouverture du colloque, jeudi 20 janvier au soir, sera projeté à l’IMA le movie& Le Soleil assassiné& d’Abdelkrim Bahloul, en présence du& réalisateur.

L’événement se conclura avec une lecture par Isild le Besco d’extraits de& Qui se souvient de la mer& de Mohammed Dib, dans le cadre des Nuits de la lecture, samedi 22& janvier.

Argument

Si l’histoire des intellectuels français face à la guerre d’Algérie a fait l’objet de plusieurs colloques, expositions et livres, la question de leur opposition à la colonisation française en Algérie et à la guerre d’indépendance est moins étudiée. C’est la raison pour laquelle Benjamin Stora, dans le rapport qu’il a remis au Président de la République en janvier 2021, a préconisé l’organisation d’un colloque worldwide
sur ce sujet.

Le président de l’Institut du Monde Arabe, Jack Lang et la présidente de la Bibliothèque nationale de France, Laurence Engel, ont souhaité accueillir dans les deux institutions ce colloque, qui se veut une
synthèse de travaux déjà menés tout en présentant des avancées sur des figures peu connues.

La notion d’intellectuel sera entendue de manière in depth, renvoyant non seulement à des penseurs, des écrivains, mais aussi à des artistes, des journalistes, des magistrats, des avocats, et des membres de la société civile (médecins, syndicalistes, hommes d’église, and so on.). La colonisation et la guerre ont influencé de façon sturdy les sociétés algérienne et française et marqué plusieurs générations, d’où l’intérêt de revenir sur des figures emblématiques.

Adoptant un périmètre temporel et géographique giant, ce colloque substitute la guerre d’Algérie dans le temps long, depuis les débuts de la conquête, mais aussi sur le plan worldwide, en présentant des
figures venant du Maghreb ou d’Europe.
Plutôt que de présenter de manière exhaustive l’ensemble des intellectuels qui se sont opposés à la colonisation et à la guerre d’Algérie, il s’agit de souligner la diversité des prises de positions, sans oublier
des parcours iconoclastes et les démarches qui ont visé à sortir des oppositions bloc à bloc.

Le colloque s’attachera à présenter une synthèse de l’historiographie. Il sera aussi diffusé en direct (sur les réseaux sociaux de l’IMA et la chaîne Youtube de la BnF) et en différé sur les sites Imarabe.org et bnf.fr. Il pourra donner lieu à publication.

Programme

20 janvier, IMA

18 h : Accueil de Jack Lang, président de l’IMA
Introduction : Benjamin Stora

19 h : Projection du movie Le soleil assassiné d’Abdelkrim Bahloul, en présence du réalisateur et de Gilles Gauthier.

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21 janvier, IMA

9 h : Accueil
9 h 30 : Présentation : Tassadit Yacine et Tramor Quemeneur

10 h – 12 h : Contestations en longue durée

Tocqueville, portée et limites d’une imaginative and prescient critique
Par& Jacques Frémeaux& (professeur honoraire, université Paris-Sorbonne)
Alexis de Tocqueville, témoin des débuts de la conquête (1837-1845), fut certainement, grâce à l’étendue de son info et la qualité de sa réflexion, un des plus fins analystes des difficultés que devait affronter le gouvernement français dans son entreprise algérienne. Ses écrits témoignent d’un effort sure pour imaginer un équilibre entre les intérêts supérieurs de son pays, l’avenir de la colonie française et le respect des populations autochtones. On peut se demander, pourtant, s’il crut vraiment que cet équilibre pouvait être& trouvé.

Jacques Frémeaux& est professeur émérite d’histoire à la Sorbonne, membre de l’Académie des sciences d’Outre-Mer et officier des Arts et Lettres en France. Il a publié une vingtaine d’ouvrages dont, sur l’histoire de l’Algérie contemporaine& :& Les Bureaux arabes dans l’Algérie de la conquête& (Denoël, 1993)& ;& La Conquête de l’Algérie& : la dernière campagne d’Abd el-Kader& (CNRS, 2019)& ;& Algérie 1830-1914& : naissance et destin d’une colonie& (Desclée de Brouwer, 2019)& ;& L’Algérie 1914-1962& : de la Grande Guerre à l’Indépendance& (éditions du Rocher, 2021).

Ismaÿl Urbain et les Saint-simoniens&
Par& Philippe Régnier& (CNRS)&

Isabelle Eberhardt ou la quête unattainable d’une colonisation idéale
Par& Tiffany Tavernier& (romancière et scénariste)
Isabelle Éberhardt, concernant l’Orient et l’Occident, pense qu’il y a un impératif de rencontre entre ratio et mystique qui, s’il ne se réalise pas, signerait le déclin de la civilisation occidentale. À partir de 1898, la réalité du terrain s’avère plus compliquée. Isabelle Éberhardt exerce un regard critique sur la colonisation en& cours.&

Après une longue période de voyages,& Tiffany Tavernier& a écrit son premier roman& Dans la nuit aussi le ciel& (Poche Seuil, 1999), prix Gabrielle d’Estrée. Depuis, elle a publié une dizaine de livres dont& L’Homme Blanc& (Poche Seuil, 2001),& Isabelle Eberhardt, un destin dans l’Islam& (Tallandier, 2017),& L’Ami& (Sabine Wepieser, 2021) finaliste prix RTL, prix Inter, Prix des libraires. En parallèle, elle a écrit des longs-métrages et des documentaires pour le cinéma et la télévision (Ça begin aujourd’hui,& Holy Lola,& Vincennes, l’université perdue).

La Ligue des droits de l’Homme
Par& Gilles Manceron& (historien)
Dès sa fondation lors de l’affaire Dreyfus, la LDH s’est souciée du respect des droits de l’Homme en Algérie, en regard non seulement & de l’antisémitisme qui y déferlait avec Édouard Drumont et les députés « antijuifs », mais aussi du statut d’infériorité des « indigènes musulmans » et des violations de leurs droits. Jusqu’en 1914, elle a suivi l’évolution de Jean Jaurès vers l’anticolonialisme et dénoncé les injustices régnant en Algérie comme dans les autres colonies. À partir de 1958, elle a opéré un tournant en dénonçant la guerre& d’Algérie.&

Gilles Manceron& est l’auteur de nombreux ouvrages, dont& Marianne et les colonies& (La Découverte, 2003), avec Madeleine Rebérioux,& Droits de l’Homme.& Combats du siècle& (Le Seuil, 2004) et avec Emmanuel Naquet,& Être dreyfusard hier et aujourd’hui& (Presses universitaires de Rennes, 2009). Il a été vice-président de la Ligue des droits de l’Homme et est président de l’association Histoire coloniale et postcoloniale (histoirecoloniale.internet).

De Maurice L’Admiral à Albert Smadja et Pierre Popie, trois générations d’avocats d’Algérie en lutte contre l’injustice coloniale (1900-1962)
Par Christian Phéline (historien)
La succession sur trois générations de membres des barreaux algériens s’étant mobilisés contre l’injustice coloniale mérite d’être rappelée. Elle va d›« indigénophiles » comme le Guadeloupéen Maurice L’Admiral, défenseur des révoltés de Margueritte (1901), à Léonce Déroulède et Yves Dechezelles, avocats de Messali Hadj et des emprisonnés du PPA à partir des années 1930 et 1940. Elle concerne aussi une phalange de jeunes professionnels plaidant la cause de militants indépendantistes, qui, jusqu’à 1962, paya un lourd tribut à la répression et aux assassinats par la Foremost Rouge ou l’OAS.

Christian Phéline& est notamment l’auteur d’Un Guadeloupéen à Alger,& Me Maurice l’Admiral& (2014), de& Les Avocats indigènes dans l’Alger coloniale& (2015), de& Aurès 1935, photographies de Thérèse Rivière et Germaine Tillion& (2018),& Sans souliers ni chemise, lettres de prison de révoltés de Margueritte& (2019),& La Terre, l’Étoile, le Couteau. Le 2 août 1936 à Alger& (2021).

Présentation du fonds saint-simonien de la BnF
Par& Anne-Bérangère Rothenburger& (conservatrice des& bibliothèques)

13 h 30 – 16 h : Actrices et acteurs de l’anticolonialisme

Les surréalistes et la guerre d’Algérie. De la défense de Messali Hadj à la Déclaration des 121
Par& Michel Carassou& (éditeur et écrivain)
L’entrée en politique du mouvement surréaliste, en 1925, s’est faite en réaction à la guerre du Rif. Dans les années 1930, contre le PCF, les surréalistes prennent parti pour l’Étoile nord-africaine, le principal mouvement nationaliste algérien, et son chief Messali Hadj. Quand éclate la guerre d’Algérie, les surréalistes avec l’extrême gauche soutiennent le parti créé par Messali Hadj, en butte à l’hostilité du FLN. Des surréalistes figurent aussi parmi les initiateurs et signataires du& Manifeste des 121.

Après avoir été directeur éditorial de CNRS Éditions,& Michel Carassou& a créé et codirigé les éditions Paris-Méditerranée, puis en 2005 les éditions Non Lieu. En tant que chercheur, ses derniers titres publiés sont& Le Surréalisme par les textes& (Classiques Garnier, 2013), en collaboration avec Henri Béhar, et une édition critique du& Lundi existentiel& de Benjamin Fondane (Non Lieu, 2021). Il s’est également intéressé à l’histoire des revues littéraires et à l’histoire de l’homosexualité au XXe& siècle (Inversions& suivi de& L’Amitié (Non Lieu, 2016).&

Frantz Fanon, un intellectuel psychiatre pour l’indépendance de l’Algérie
Par& Pascale Pellerin& (CNRS, IHRIM/Lyon 2)
Frantz Fanon, psychiatre martiniquais, publie en 1952 son premier essai,& Peau noire, masques blancs. Il obtient un poste en 1953 à Blida en Algérie. Comme militant et psychiatre, il veut détruire le système colonial pour libérer à la fois le colon et le colonisé. Il s’interact très vite aux côtés du FLN. C’est un fils des Lumières qui n’a pas rejeté cet héritage mais, qui, au contact des indépendantistes algériens, a été amené à transformer la conception abstraite des droits de l’homme en lutte concrète du droit des& peuples.

Pascale Pellerin& travaille depuis plusieurs années sur la development des Lumières dans la conquête et la colonisation de l’Algérie. Elle a publié un essai,& Les Philosophes des Lumières dans la France des années noires& et dirigé deux volumes,& Rousseau, les Lumières et le monde arabo-musulman& (Garnier, 2017) et& Les Lumières, l’esclavage et l’idéologie coloniale& (Garnier, 2020). Elle est l’autrice d’une soixantaine d’articles.

Robert Barrat (1919 – 1976)& : un intellectuel catholique engagé dans la guerre de Libération nationale algérienne
Par& Malika El Korso& (université d’Oran)
Journaliste, militant catholique de la lutte anticoloniale, Robert Barrat reste une des figures les plus emblématiques des catholiques de gauche, dont le premier contact avec l’Algérie a lieu en 1939. Il est approché par un groupe d’Algériens, à Paris, qui l’alertent sur la state of affairs en Algérie en avril 1954. Les voyages qu’il entreprend par la suite en tant que journaliste font qu’il prend fait et cause pour la Révolution algérienne dont il sera l’un des animateurs auprès des métropolitains, ce qui lui vaudra bien des déboires auprès des autorités politiques et& judiciaires.

Malika El Korso& est notamment l’autrice d’Algérie 1954-1962, la torture en question& : le file Jean Muller& (Dahleb, Alger, 2013), et de& La Guerre de libération nationale algérienne à travers& Témoignage Chrétien. 1954-1962& (ANEP, Alger,& 2014).&

Francis Jeanson et les porteurs de valises : quelle(s) histoire(s) ?
Par Marie-Pierre Ulloa (Stanford College) 
« Le réseau Jeanson » demeure la hint historique la plus saillante du philosophe sartrien Francis Jeanson (1922-2009). La puissance symbolique de son nom évoque l’un des épisodes les plus clivants de l’histoire de la guerre d’Algérie, celui d’un réseau de Français qui ont pris fait et trigger pour l’indépendance de l’Algérie et pour le FLN en France. Il s’agira de revenir sur les modalités de l’engagement des porteurs de valises, de mettre en lumière le rôle des femmes du réseau et de faire le point sur l’historiographie des réseaux des porteurs de valises en 2021.

Marie-Pierre Ulloa& est l’autrice de& Francis Jeanson, un intellectuel en dissidence, de la Résistance à la guerre d’Algérie& (Stanford College Press, 2008) et& Le Nouveau Rêve américain, du Maghreb à la Californie& (CNRS Éditions, 2019). Ses recherches portent sur l’histoire culturelle et intellectuelle de la France et du Maghreb.

Gisèle Halimi. Le corps des femmes
Par& Zineb Ali Benali& (professeur honoraire, université Paris 8)&
Gisèle Halimi a été avocate du FLN de 1955 à 1962. Deux affaires retiennent particulièrement l’consideration& : El Halia en 1955 et Djamila Boupacha à Alger en 1960. Elle se bat pour l’établissement de la vérité, contre la machine judiciaire des tribunaux d’exception, en s’attachant à ce que les corps ne soient pas oubliés& : le corps torturé et éliminé, et le corps (féminin) pour lequel le viol est la dernière étape de la& torture.

Zineb Ali Benali& a notamment publié « Écritures féminines des pays du Maghreb& : circumstances d’émergence et problématiques », in& Revue d’études francophones& (n°19, 2009) et « Le corps refait », Catherine Brun et Todd Shepard (dir.),& La Guerre d’Algérie, le sexe outragé& (CNRS Éditions, 2016).

La « guerre des manifestes »
Par& Tramor Quemeneur& (université Paris 8 Cergy-Pontoise)
En septembre 1960, alors que s’ouvre le procès du « réseau Jeanson », du nom du philosophe existentialiste Francis Jeanson à la tête d’un réseau d’aide clandestin au FLN, 121 intellectuels, bientôt rejoints par 125 autres, signent une& Déclaration sur le droit à l’insoumission dans la guerre d’Algérie, autrement dénommée& Manifeste des 121. Ce qui apparaît alors comme un scandale politique et intellectuel provoque la réaction d’intellectuels favorables à « l’Algérie française » qui publient en retour un& Manifeste des intellectuels français pour la résistance à l’abandon. Mais plus de 16 000 signataires rejoignent ensuite l’Appel à l’opinion pour une paix négociée, dont Paul Ricœur, Roland Barthes, Edgar Morin ou encore Jacques& Prévert.

Tramor Quemeneur& a notamment codirigé& 8 novembre 1942. L’Afrique du Nord dans la Seconde Guerre mondiale& (Le Croquant, 2021) et& La Guerre d’Algérie revisitée. Nouvelles générations, nouveaux regards& (Karthala, 2015). Il est aussi l’auteur de& La Guerre d’Algérie& (éditions Prisma Géo, 2012) et est membre du Conseil d’orientation du Musée national d’histoire de l’immigration& (MNHI).

Présentation des collections de presse de la BnF sur la guerre d’Algérie

16 h 30 – 18 h 30 : Comparaisons et transmissions

Édouard Méric& : un officier supérieur artisan atypique de la décolonisation en Tunisie et au Maroc: 1954-1956&
Par& Daniel Rivet& (professeur honoraire, université Paris-Sorbonne)
Le général Méric (1901-1973) fut d’abord un officier des Affaires indigènes dans l’extrême sud du Maroc de 1926 à 1941. Au cours d’une affectation en Cochinchine après 1945, il réalise que l’ère coloniale est révolue et qu’il s’agit de passer la foremost aux élites auto-européanisées. En Tunisie et au Maroc, il agira en ce sens en tant que dernier directeur de l’Intérieur des deux& protectorats.

Parmi les nombreuses publications de& Daniel Rivet, nous retiendrons sa thèse consacrée à& Lyautey et l’establishment du protectorat français au Maroc, 1912-1925& (3 vol., L’Harmattan, 1988),& Le Maghreb à l’épreuve de la colonisation,1830-1962& (Hachette-Littérature, 2002) et& Histoire du Maroc, de Moulay Idriss à Mohammed VI& (Fayard,& 2012).

L’intelligentsia critique face à la décolonisation tragique, de l’Indochine à l’Algérie
Par Alain Ruscio (historien)
Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, la France est entrée dans un nouveau cycle de conflits, souvent violents, parfois ouvertement armés (1945-1962). En métropole, des intellectuels, dont certains de renom (François Mauriac, Jean-Paul Sartre, Claude Bourdet, Simone de Beauvoir, Albert Camus, Louis Aragon, Marguerite Duras, et bien d’autres) ont commenté avec sévérité les engagements de la France officielle et ont, dans quelques cas, franchi le pas de l’motion militante, voire illégale, en faveur des colonisés.

Les derniers ouvrages d’Alain Ruscio& portent sur l’histoire de l’Algérie et ses répercussions dans la société française& :& Nostalgérie, l’interminable histoire de l’OAS& (2015)& ;& Les Communistes et l’Algérie, des origines à la guerre d’indépendance, 1920-1962& (2019). Il coordonne depuis trois années la publication d’une& Encyclopédie de la colonisation française& (4 volumes parus, éditions Les Indes savantes).

Struggle and the ivory tower, vingt ans après
Par& David L. Schalk& (professeur honoraire, Vassar school)

La gauche italienne contre la guerre d’Algérie. L’extraordinaire campagne de soutien à Gilberte et Henri Alleg
Par& Andrea Brazzoduro& (université Ca’ Foscari de Venise)&
Au-delà de cercles gouvernementaux et des prises de positions d’intellectuels bien connus, l’influence de la guerre d’indépendance algérienne sur la société italienne fut assez necessary. En se focalisant sur l’extraordinaire campagne de soutien à Gilberte et Henri Alleg lancée par le quotidien communiste l’Unità& en septembre-octobre 1958, il s’agira de montrer l’ampleur de cet impression dans un pays fortement marqué par une vive mémoire de la récente lutte& antifasciste.

Andrea Brazzoduro, chercheur invité à l’université d’Oxford (School of Historical past et Maison Française d’Oxford), est boursier Marie Sklodowska-Curie International Fellow à l’université Ca’ Foscari de Venise où il est Principal Investigator pour le projet de recherche Horizon 2020 « Algeria, Antifascism, and Third Worldism& : An Anticolonial Genealogy of the Western European New Left (Algeria, France, Italy, 1957–75) ».

22 janvier, BnF

9 h 15& : Mot d’accueil de& Laurence Engel, présidente de la& BnF

9 h 30 – 11 h : Figures du contact

Des engagements divergents d’intellectuels face à la guerre d’Algérie& : Raymond Aron et Jacques Soustelle
Par& Guy Pervillé& (professeur honoraire, université de Toulouse Le Mirail)&
Dès novembre 1955, l’ancien intellectuel de gauche Jacques Soustelle avait très fermement répondu à un manifeste contre la guerre d’Algérie. Par la suite, il fut à l’origine d’un manifeste « pour le salut et le renouveau de l’Algérie française ». Raymond Aron prit une position à première vue semblable dans une pétition de professeurs à la Sorbonne publiée le 23 mai 1956. Mais sa véritable position fut révélée un an plus tard quand il publia& La Tragédie algérienne, plaidoyer rationnel pour l’inévitabilité de& l’indépendance.

Man Pervillé, professeur émérite des universités, a publié de nombreuses recherches sur l’histoire de l’Algérie contemporaine et de la guerre d’Algérie, notamment son dernier livre : Histoire iconoclaste de la guerre d’Algérie et de sa mémoire (Paris, éditions Vendémiaire, 2018).

Des intellectuels universitaires de l’entre deux& : André Mandouze, Jacques Pereyga et Jean Leca
Par& Aïssa Kadri& (professeur honoraire, université Paris 8)
La communication portera sur les circumstances d’engagement de quelques personnalités représentatives des groupes de l’entre-deux& ; circumstances subreptices, inattendues ou prédéterminées par leurs trajectoires, de basculement vers la dénonciation de la répression et le soutien à la lutte du peuple& algérien.

Aïssa Kadri& a notamment préfacé l’ouvrage de Michel Kelle,& 5 figures de l’émancipation algérienne, des modèles pour un renouveau des rapports franco-algériens& (Karthala, 2013).

Jean-Jacques Servan-Schreiber, le refus du silence&
Par& Christian Delporte& (professeur émérite, université Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines)&
La communication évoquera l’infatigable engagement de Jean-Jacques Servan-Schreiber pour la paix en Algérie et contre la torture. Dès 1954,& L’Categorical, qu’il vient de créer, prend clairement place dans le conflit qui begin, notamment grâce aux plumes de Camus, Mauriac, Daniel et Servan-Schreiber lui-même qui, rappelé en 1956 avec le grade de lieutenant, sert près d’Alger sous les ordres du général de La Bollardière. Démobilisé et de retour à& L’Categorical, il y témoigne de son expérience militaire en Algérie, ce qui lui vaut d’être inculpé pour « atteinte au ethical de l’armée ».& L’Categorical& est saisi plusieurs& fois.&

Spécialiste d’histoire politique et d’histoire des médias,& Christian Delporte& est président de la Société pour l’histoire des médias (SPHM) et directeur de la revue& Le Temps des médias. Ses derniers livres publiés sont& Charlie Hebdo, la folle histoire d’un journal pas comme les autres& (Flammarion, 2020)& ;& Philippe Henriot. La résistible ascension d’un provocateur& (Flammarion, 2018)& ;& 100 ans de journalisme. Une histoire du Syndicat national des journalistes& (Nouveau-monde Éditions,& 2018).

La résistance morale dreyfusarde& : Paul Ricoeur et Pierre Vidal-Naquet
Par& François Dosse& (université Paris-Est-Créteil-Val-de-Marne / Sciences Po Paris)
Paul Ricœur, philosophe appartenant à la mouvance des chrétiens progressistes de la revue& Esprit& prend place dès 1947 pour l’émancipation nationale des Algériens, mais ce sont surtout les révélations sur la torture en 1957 qui vont susciter son engagement contre la guerre d’Algérie. De son côté, l’historien Pierre Vidal-Naquet, intellectuel dreyfusard, meurtri pour toujours par la disparition de ses mother and father à Auschwitz en 1944, s’interact tôt contre la guerre d’Algérie et notamment contre l’usage de la& torture.&

François Dosse& est professeur émérite de l’université Paris 12 et chercheur associé à l’IHTP (Institut d’histoire du temps présent). Il est l’auteur d’ouvrages sur l’histoire intellectuelle de la France, d’historiographie et de biographies de Paul Ricœur, Michel de Certeau, Gilles Deleuze& && Félix Guattari, Cornélius Castoriadis, Pierre Nora et Pierre Vidal-Naquet. Ses derniers ouvrages sont& La Saga des intellectuels français, 1944-1989& (2 vol. Gallimard, 2018)& ;& Pierre Vidal-Naquet& (La Découverte, 2020)& ;& Amitiés philosophiques& (Odile Jacob, 2021).

Présentation du fonds Germaine Tillion sur l’Algérie à la BnF
Par& Laurence Le Bras& (conservatrice des& bibliothèques)

11 h 30 – 13 h : Engagements intellectuels

François Mauriac
Par Jean-Luc Barré (éditeur et écrivain) 

Albert Camus 
Par Benjamin Stora (professeur honoraire, université Sorbonne Paris Nord)

Comprendre l’humanisme politique de Germaine Tillion 
Par Tassadit Yacine (EHESS)
Germaine Tillion a été parmi les rares femmes à s’intéresser à la guerre d’Algérie et à s’impliquer dans le combat que livrent les algériens aux Français. L’engagement de cette grande figure ne s’enracine pas dans une position « politique » mais dans sa formation d’ethnologue et  son passé de résistante : être au plus près des dominés en leur attribuant l’essentiel pour vivre. Seule à animer les centres sociaux par exemple et à avancer des arguments à contre-courant de la pensée dominante, Germaine Tillion prône en réalité un humanisme politique qui lui est bien spécifique.

TÉLÉCHARGER LA BIBLIOGRAPHIE DE GERMAINE& TILLION

Tassadit Yacine& est anthropologue, spécialiste des sociétés berbères. Elle tente de comprendre les mécanismes de domination culturels et de genres en période coloniale. Ses derniers ouvrages publiés sont& :& Avec Mouloud Mammeri& (textes recueillis et présentés par Hafid Adnani, Paris, Non Lieu, 2018)& ;& Femmes berbères de part et d’autre de la Méditerranée& (Paris, Non Lieu, 2018)& ;& Germaine Tillion, une ethnologue engagée& (Paris, Non Lieu,& 2019).

14 h 30 – 16 h 30 : Figures littéraires de l’entre-deux

Le numéro spécial& Algérie, coordonné par Jean Sénac et publié par Jean Digot et Jean Subervie (février 1957)
Par& Christiane Chaulet Achour& (professeure honoraire, université Paris Cergy)&
Il s’agira de resituer ce numéro dans le contexte de 1957, année charnière, et du rôle joué par Jean Sénac dans la résistance au colonialisme& ; il s’agira aussi d’analyser les nombreuses contributions d’écrivains et de peintres algériens qui le composent ainsi que la place de l’éditeur& français.

Christiane Chaulet Achour& a publié de nombreuses articles et ouvrages sur la littérature algérienne. Elle collabore régulièrement à la& Revue A& et à la revue culturelle en ligne& Diacritik. Elle a publié avec Jamel-Eddine Bencheikh& Jean Sénac, Clandestin des deux rives& (Biarritz, éditions Séguiers,& 1999).

Emmanuel Roblès, la Fédération des libéraux et Espoir-Algérie : quelques portraits
Par Man Dugas (professeur honoraire, université Montpellier 3) 
Popularisé en 1955-1956, le mouvement des libéraux recouvre en réalité différents groupes œuvrant depuis le début de la guerre pour une answer médiane entre Algérie française et Algérie indépendante. À la suite du fameux appel d’Albert Camus en faveur d’une trêve civile (22 janvier 1956), Emmanuel Roblès prend l’initiative de réunir tous ces mouvements en une Fédération des libéraux d’Algérie qui aura avec Espoir-Algérie son organe d’info. C’est l’histoire de cette éphémère fédération qui sera ici brièvement racontée, en même temps que seront dressés les portraits de quelques-uns de ses animateurs algériens et français.

Kateb Yacine, ou l’intellectuel algérien en poète
Par Catherine Milkovitch-Rioux (université Clermont Auvergne) 
C’est dans un contexte d’émergence générationnelle d’intellectuels algériens de langue française que Nedjma paraît en 1956, couvrant la période antérieure (1945-1954) et évoquant les émeutes du 8 mai 1945. La violence de ces événements porte selon Kateb les ferments de la guerre d’indépendance et constituent le renforcement d’une conscience politique, dont on peut lire les manifestations dans les premiers textes journalistiques (Minuit passé de douze heures. Écrits journalistiques (1947-1989), les entretiens (Le Poète comme un boxeur. Entretiens 1958-1989), en écho avec l’œuvre poétique, depuis Soliloques, romanesque et dramatique.

Catherine Milkovitch-Rioux& a coordonné plusieurs travaux collectifs, notamment& Enfances en guerre. Témoignages d’enfants sur la guerre& (Georg éditeur, 2013),& Enfants en temps de guerre et littératures de jeunesse& (BnF, 2013),& Réfugier. Carnets d’un campement urbain& (La Boîte à bulles, 2021). Elle a publié& Mémoire vive d’Algérie. Littératures de la guerre d’indépendance& (Buchet-Chastel, 2012) et dirigé de 2009 à 2013 le projet de l’ANR « Enfance Violence Exil& ».

Mouloud Mammeri à la lumière du conflit algérien : un engagement méconnu 
Par Hervé Sanson (ITEM CNRS/ENS) 
Auteur célèbre de La Colline oubliée, roman précurseur de la littérature maghrébine de langue française paru en 1952 et grand promoteur de la culture berbère, Mammeri n’est pas fréquemment associé à la guerre d’indépendance de son pays. Pourtant, il mena une motion réelle au service de la lutte anticoloniale : articles, rapports adressés à l’ONU sous divers pseudonymes, et signa deux romans « engagés » : Le Sommeil du juste (1955) et L’Opium et le bâton (1965).

Membre associé à l’ITEM (CNRS),& Hervé Sanson& est spécialiste des littératures francophones du Maghreb. Parmi ses dernières publications, il a coordonné un numéro de la revue& Europe& en 2020 sur Mohammed Dib et collaboré à l’édition du& Manuscrit inachevé& d’Assia Djebar, publié aux Presses Sorbonne Nouvelle au printemps 2021. Il a, en outre, édité une pièce inédite de Dib,& Le Vœu de la septième lune& (éditions El Kalima, Alger, 2019).

Jean Amrouche et les « maîtres coloniaux »
Par& Nicolas Harrison& (King’s School London)
La France comme mythe et comme réalité& de Jean Amrouche est publié en janvier 1958. Si ce réquisitoire contre l’ethnocentrisme français et le colonialisme choque les lecteurs du& Monde, c’est en partie parce qu’à l’époque Amrouche représente, aux yeux de certains, le comble de l’assimilation coloniale& ; et la puissance extraordinaire de son intervention provient non seulement de son acuité politique et philosophique, mais aussi de sa dimension& autobiographique.

Nicolas Harrison& est notamment l’auteur de& Circles of Censorship& (Oxford College Press, 1995)& ;& Postcolonial Criticism: Historical past, Principle and the Work of Fiction& (Polity Press, 2003 et 2018)& ;& Our Civilizing Mission: The Lessons of Colonial Schooling& (Liverpool University Press, 2019).

Présentation du fonds de la photothèque de l’IMA (sous& réserve)

17 h – 18 h 30 : Productions artistiques : théâtre, cinéma et arts plastiques

Théâtres empêchés&
Par& Catherine Brun& (université Sorbonne Nouvelle)&
Sur la centaine de pièces qui mettent en scène & les événements algériens, les trois-quarts sont postérieures aux années 1980, et moins d’une sur cinq est contemporaine de la guerre. C’est que les dramaturges peinent à se faire entendre. Les dramaturges algériens qui écrivent en français et embrassent la trigger indépendantiste sont contraints de s’expatrier. Du côté des dramaturges français, les écarts entre date de composition et date de création, les circumstances de création, les dates et lieux d’édition témoignent de l’embarras lié aux références algériennes. Le scandale de la mise en scène des& Paravents& à l’Odéon en 1966 en est une confirmation plus qu’un& contre-exemple.

Catherine Brun& est professeure de Littératures et Théâtres de langue française à l’université Sorbonne Nouvelle (UMR THALIM). Elle a consacré de nombreux articles et plusieurs ouvrages à l’écriture et la mémoire de la guerre d’indépendance algérienne& :& Guerre d’Algérie& : le sexe outragé& (avec T. Shepard dir., 2016)& ;& Guerre d’Algérie. Les mots pour la dire& (dir., 2014)& ;& Algérie, d’une guerre à l’autre& (dir., 2014)& ;& Engagements et déchirements. Les intellectuels et la guerre d’Algérie& (avec O. Penot-Lacassagne,& 2012).

Faire la lumière dans les salles obscures : les cinéastes de la Nouvelle Obscure face à la guerre d’Algérie 
Par Philip Dine (National College of Eire Galway) 
Rejetant le(s) studio(s) et la « tradition de qualité » en faveur de la rue et d’un fashion documentaire, la « Nouvelle Obscure » iconoclaste aborde la transformation socio-économique des « Trente Glorieuses » mais aussi les guerres de décolonisation. Bruit de fond pour certains, évocation allégorique chez d’autres, la guerre d’Algérie deviendra un thème clé pour le groupe « Rive gauche ». 

Philip Dine& est professeur d’études françaises et francophones à l’Université nationale d’Irlande à Galway. Il est notamment l’auteur de& Photographs of the Algerian Struggle& (Oxford College Press, 1994). Ses publications incluent de nombreux articles et chapitres d’ouvrages sur les représentations de l’empire français, et la& décolonisation.

Les cinéastes anticolonialistes&
Par& Ahmed Bedjaoui& (université Alger 3)
Le cas le plus connu de cinéaste anticolonialiste est celui de René Vautier qui a toujours revendiqué sa place de militant français opposé à la guerre coloniale. Mais cet exemple ne doit pas occulter le rôle & de réalisateurs comme Pierre Clément, Yann le Masson, Cécile Decugis ou encore Jacques& Charby.

Ahmed Bedjaoui, lauréat de l’Institut des hautes études cinématographiques (IDHEC – Paris) est notamment l’auteur de& Pictures et visages& (avec Denis Martinez),& Cinéma et guerre de libération. Algérie, des batailles d’pictures, & et& La Guerre d’Algérie dans le cinéma mondial& (éditions Chihab).

Mohamed Khedda et Ernest Pignon Ernest&
Par& Émilie Goudal& (université de& Lille)

18 h 45 : Conclusion : Tassadit Yacine et Tramor Quemeneur

19h-20h : Ce colloque est suivi de lectures d’extraits de Qui se souvient de la mer de Mohammed Dib par Isild Le Besco

Informations pratiques

  • Institut du Monde Arabe, jeudi 20, vendredi 21 janvier 2022
    L’accès à l’institut du monde arabe nécessite la présentation d’un cross sanitaire européen pour toutes les personnes de 18 ans et plus. Cette obligation s’étendra à toutes les personnes de 12 ans et plus à partir du 30 août.
    Réserver son billet pour le 20 janvier, auditorium niveau -2, Placement libre.
    Réserver son billet pour le 21 janvier, Salle du haut-conseil, 9e étage
  • Bibliothèque nationale de France, samedi 22 janvier 2022, Petit auditorium
    Entrée Est, face rue Émile Durkheim, Paris 13e
    Entrée gratuite – Réservation recommandée by way of l’software Affluences ou sur affluences.com
    Il est recommandé de se présenter en avance (jusqu’à 20 minutes avant la manifestation)
  • À suivre en direct le 22 janvier sur la chaîne YouTube :

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